SNCF face au handicap : quai inaccessible, prenez un taxi !

Amandine, avec des béquilles, se rend à la gare pour prendre son train. Problème : l'ascenseur est hors service. Réponse de la SNCF : prenez un taxi ! Les usagers handicapés des transports franciliens réclament un peu de considération.

• Par
Illustration article SNCF face au handicap : quai inaccessible, prenez un taxi !

Il est près de 10h quand Amandine arrive à la gare de Pontoise (Val d'Oise). Elle a l'habitude d'emprunter cette ligne et a tout prévu pour monter dans le train de 10h11, direction Paris-Saint-Lazare. Elle n'embarquera, finalement, jamais à bord... Elle avait pourtant fait le plus dur. Contourner les endroits sinueux, passer les travaux, accéder à la gare... Un sacré parcours pour cette jeune femme qui se déplace à l'aide de béquilles. Mais tous ces efforts n'auront servi à rien puisque l'ascenseur qui mène au quai est hors service.

Une souffrance H24

« Pour causes de travaux, pas d'ascenseur ni d'escalator, lui explique-t-on. Appelez un taxi ou prenez le train direction Eaubonne où vous en prendrez un autre qui vous emmènera à Saint-Lazare. » Pourtant, « rien n'était indiqué à cet effet sur le site de la SNCF », affirme-t-elle. Sa réponse ne se fait pas attendre : « Oh ! Vous réfléchissez un peu ? J'ai un sac qui pèse une tonne, je suis à béquilles, je ne peux pas faire un marathon pour prendre un train ! ». Amandine est atteinte du syndrome de Little depuis sa naissance, une paralysie cérébrale qui entraîne notamment des difficultés pour se déplacer. « J'ai des douleurs continuelles, qui ne se voient pas. Je suis debout, j'avance mais je souffre 24 heures sur 24, ça ne s'arrête jamais ! »

Un combat pour l'accessibilité

L'âme guerrière, elle remue ciel et terre pour trouver une solution avec les agents présents en gare mais la réponse est inlassablement la même : « Le taxi ! ». Une réaction « sans scrupule » décrit-elle, qui résonne comme un coup de poignard. « J'ai eu envie de hurler, de pleurer, de taper sur tout et n'importe quoi mais il fallait que je trouve comment rentrer chez moi, à Bordeaux », se remémore-t-elle. Sa mère se dit lassée de devoir se battre depuis 25 ans pour que sa fille « puisse vivre comme les autres ». D'autres incidents similaires remontent à la surface, et Amandine se souvient des raisons qui l'ont poussée à quitter l'Île-de-France pour emménager dans une ville « plus accessible ».

Des solutions méconnues

Amandine appelle un taxi, consciente qu'elle n'a guère d'autre choix. Elle a du mal à digérer la facture de 78 euros et contacte donc Access Plus, service gratuit d'accueil en gare et d'accompagnement des personnes handicapées, qui la redirige vers sa filiale « Transilienne ». « Qu'est-ce que c'est que ce truc encore ? Jamais entendu parler ! », pense-t-elle. Elle compose donc le numéro d'Access Plus Transilien qui lui répond : « Il fallait nous appeler avant. Et la gare de Pontoise aurait dû vous orienter vers nous ». Amandine avait pourtant demandé quelles solutions s'offraient à elle et n'était pas censée savoir que l'ascenseur serait en panne... « Cet incident m'a permis de découvrir un nouveau service mais quand est-ce que les personnes handicapées les connaîtront tous ? », s'interroge-t-elle.

Des discriminations récurrentes

« Je suis très préoccupé par ces situations de discriminations, de services non rendus par SNCF Réseau Île-de-France, réagit Claude Boulanger Reijen, dirigeant de la commission transports et mobilité du CESER* d'Île-de-France. Access Plus Transilien aurait dû être réservé par l'agent de la gare de Pontoise dans l'immédiat, après un accueil clientèle digne ce nom ». Malheureusement, l'histoire d'Amandine n'est pas un cas isolé. On se souvient notamment de Soumaïla Traoré, qui s'était lancé à la poursuite d'un bus, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) parce qu'il refusait de le laisser monter avec son fauteuil roulant (article en lien ci-dessous). La région parisienne a encore de gros efforts à fournir pour devenir un modèle en matière d'accessibilité. « Depuis cet épisode, je vis dans l'angoisse permanente de ne pas pouvoir me rendre chez ma famille à Noël ; j'en ai marre de devoir chercher un itinéraire accessible, regrette Amandine. Je dois faire face à un double combat perpétuel : celui de la maladie et de ma liberté. Je ne demande pas la lune, juste de pouvoir vivre et non survivre ! »

* Conseil économique, social et environnemental

Partager sur :
  • LinkedIn
  • Twitter
  • Facebook
"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Cassandre Rogeret, journaliste Handicap.fr"
Commentaires1 Réagissez à cet article

Thèmes :

Handicap.fr vous suggère aussi...
1 commentaire

Rappel :

  • Merci de bien vouloir éviter les messages diffamatoires, insultants, tendancieux...
  • Pour les questions personnelles générales, prenez contact avec nos assistants
  • Avant d'être affiché, votre message devra être validé via un mail que vous recevrez.